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Par Régis Rémy. Régis Rémy est CPE à Caen, en lycée polyvalent avec internat.. Ce lycée recrute ses élèves dans 2 collèges en ZEP. Le public lycéen est composé de 40% de catégories sociales défavorisées. LES IDEES DEVELOPPEES DANS CETTE CONFERENCE : ETRE CPE C'EST EXERCER UN METIER QUI S'INSCRIT DANS UN SERVICE PUBLIC D'EDUCATION · AU CŒUR DE LA REALITE DU SYSTEME EDUCATIF, IL S'AGIT D'UN METIER COMPLEXE, PARCE QUE LE SYSTEME EDUCATIF EST CONSIDERE COMME UN SYSTEME DE MASSE Þ PROBLEME DE MAITRISE DES ENJUEUX DE LA MASSIFICATION · LE METIER DE CPE EST PRESENT DANS LES DIFFERENTS TYPES D'ETABLISSEMENTS (COLLEGE, LEP, LT, LYCEE D'ENSEIGNEMENT GENERAL). · LES FINALITES DE CE METIER : TRIPLE OBJECTIF : d'accès au savoir de socialisation d'insertion sociale · CE METIER EST CENTRE SUR LE SUIVI INDIVIDUEL DE L'ELEVE, PRINCIPALEMENT : un collectif ne réussit pas un BEP. La réussite scolaire concerne des gens, bien plus que des entités. · C'EST UN METIER AU CONTACT DE TOUS LES PARTENAIRES DES ETABLISSEMENTS SCOLAIRES. · C'EST UN METIER DE LA VIE SCOLAIRE. Þ Qu'est-ce qu'être CPE aujourd'hui ? : c'est poser une triple question qui prend en compte : la diversité des publics scolaires et des individus la question de la massification et 2 problèmes en complémentarité : la réussite scolaire et la vie scolaire. Le métier de CPE est une fonction de proximité avec la jeunesse scolarisée dans le second degré. La question de l'évolution de cette jeunesse est la question du comment on en est arrivé là. 1ERE PARTIE : I) HISTORIQUE DU SYSTEME EDUCATIF 4 étapes : · 1950-1970 : Les effectifs du 2e degré se multiplient par 3. Le second degré croît 4 fois plus vite que les effectifs des classes correspondantes : décalage entre le nombre d'enfants qui naissent et les enfants qu'on scolarise. 1960 : 43% d'une classe d'âge accède en 6e. 1980 : 100% d'une classe d'âge accède en 6e. · Début des années 80 : Le système connaît un début d'élan de massification. Entre 1980 et 1990, le nombre de bacheliers passent de 225 000 à 400 000. Aujourd'hui 9 jeunes sur 10 entre 11 et 20 ans poursuivent des études dans le second degré. Un jeune français a une espérance scolaire de 19 ans (à partir de 2 ans). Le taux d'accès au bac : 1960 : 10% d'une classe d'âge 1980 : 25%. · 1985 : Un thème apparaît fort : Chevènement popularise la notion de 80% d'une classe d'âge au bac. Ceci constitue encore aujourd'hui le plus grand débat sur l'éducation : en effet, comment se vivent les 20% restant ? Le taux des 80 % est entré profondément dans la société française. 2000 : la proportion d'une classe d'âge qui obtient le bac : 61% (600 000 bacheliers). En 20 ans le système français a accueilli 400 000 bacheliers supplémentaires. II) EVOLUTION DU METIER · De 1950 à 1970 : Emerge la notion d'éducation ; avant la fin de la 2e guerre mondiale, ce thème n'était pas à l'ordre du jour. La notion de vie scolaire apparaît explicitement en 1968 : 68 est l'année où se pensent les premières notions sur le système représentatif : 1eres notions accordant une place aux lycéens : notions de président et vice-président des élèves. · Début des années 80 : Pour les CPE, 82 : la circulaire. Cette circulaire est la fondation du métier de CPE. C'est le seul texte fondateur du métier. · 1985-1993 : Le taux de 80% conduit une révolution permanente du métier de CPE. C'est un métier de proximité avec les élèves Þ le métier change, car nouveaux élèves quantitativement et qualitativement. · Depuis 1994 : Fin de la massification. Entrée des étudiants CPE à l'IUFM : avant, chacun préparait le concours dans son coin. III) MASSIFICATION DU SYSTEME Démocratisation : accès du plus grand
nombre au plus haut des capacités du système. Mais, il faut prendre
en compte aussi la massification, car ce concept a eu des répercussions
sur le métier. Massification : se trouve confirmer la persistance d'une
relation étroite entre réussite scolaire et origine sociale. En accueillant
tous les jeunes d'une même classe d'âge, la conséquence est l'irruption
des problèmes sociaux et psychologiques dans l'école. La vie scolaire
: · Le système éducatif désigne à travers la vie scolaire, à la fois
: l'organisation technique des lieux de vie un moyen d'action éducative
· A partir de 1980, officialisation de ces concepts de CPE : circulaire
de 82 qui parle de la vie scolaire à ce moment-là, le pouvoir politique
décide d'implanter dans tous les établissements scolaires un poste de
CPE : en 1980, 80% des collèges sont dépourvus de CPE. Aujourd'hui,
10%. A cette époque-là, le pouvoir politique et le système éducatif
ne ressentaient pas la même exigence ; on pouvait se passer du CPE.
Le public était différent. · La vie scolaire est : un processus d'éducation
lié au vécu hors la classe. C'est un acte complémentaire de l'acte d'enseignement.
L'exercice de la prise de responsabilité d'adulte ne se fait pas qu'en
classe. La majorité des jeunes Français ont un espoir de scolarisation
de 19 ans. Pendant tout le moment de son enfance, de sa pré-adolescence,
de son adolescence, le jeune va avoir comme repère la famille et l'école
; il y a quelques années, on aurait dit que ces repères étaient donné
par les colonies, les mouvements de jeunes… Aujourd'hui, ces mouvements
sont affaiblis, en terme de pourcentage de jeunes accueillis Þ entre
la famille et l'école, il reste la rue Þ la vie scolaire est un sas
progressif entre la famille et l'intégration sociale. 2E PARTIE : la
dimension spécifique du métier de CPE, LA CIRCULAIRE DE 1982 : Concerne
les pratiques professionnelles, les objectifs poursuivis. Les pratiques
professionnelles définies dans la circulaires de 82 ont gardé toute
leur acuité. Les CPE exercent dans tous les types d'établissements Þ
caractéristiques différentes selon le public accueilli, le lieu d'implantation,
la taille et les formations offertes. Tous les établissements sont hétérogènes,
comme les publics qui les fréquentent Þ CPE différents. METIER A TRAVERS LES TYPES D'ETABLISSEMENTS · Si les élèves n'étaient pas là pour apprendre, il n'y aurait pas de CPE. · 2 élèves sur 3 passent du collège au lycée aujourd'hui. · Pour les publics qui fréquentent les lycées, il y a similitude entre LP, lycée d'enseignement général et LT. · Ce public est souvent dans une recherche de relationnel et de dialogue avec le CPE : Cf l'enquête de R. Ballion : les élèves ont du CPE la vision la plus positive parmi tous les personnels travaillant dans un établissement. Il existe une demande de relationnel avec des personnels qui ont une fonction de canaliser ce relationnel et permettre aussi que les élèves s'expriment. Un CPE peut parler de tout avec les élèves. Þ La proximité, la quotidienneté créent un lien suffisamment fort pour que, quand l'adolescent le ressent ses propos soient transmis au CPE ; et l'adulte qu'est le CPE va leur renvoyer une image, un conseil en éducation. · Le lycée est une communauté éducative importante. 1 jeune sur 3 fréquente un établissement de plus de 1500 élèves (et c'est beaucoup). Mais, parmi ce public scolaire, ce ne sont pas toujours des élèves pour lesquels les problèmes sociaux sont gérés par eux et leur famille. Le problème est effectivement pour les " nouveaux lycéens " : ce sont les 30% qui sont venus s'ajouter depuis 1985. Ce sont ceux qui ne bénéficient pas d'un milieu " naturellement " social et culturel qui les prédisposent à suivre des études longues. Le terme de " nouveaux lycéens " désigne un public aux caractéristiques sociales et au comportement scolaire en rupture avec le public habituel. Ce public est issu de catégorie sociale qui n'avaient pas, dans leur majorité, eu accès à l'enseignement secondaire long. Enquête de M. Choquet en 1993 sur 12000 lycéens : de l'aveu même des élèves (enquête confidentielle) 18,6% des élèves disaient avoir régulièrement des conduites violentes, 2,3% reconnaissaient avoir pratiqué le racket 15% disaient avoir consommé de la drogue au cours des 10 derniers mois, et 6% régulièrement. 9% pensaient au suicide 4% disaient avoir fait des fugues. AUTRE POINT RELATIF AU METIER : enseignement et socialisation. · Les élèves sont en demande de relation surtout avec le CPE Þ cela traduit un besoin de communication qui peut faire défaut dans la vie familiale de certains jeunes. Mais si le CPE n'entend pas cette demande Þ mécontentement du jeune Þ incompréhension. · Le métier de CPE comprend une dimension éducative : il s'agit d'offrir une relation dans le temps ; il s'agit pour un élève de suivre le CPE Þ ceci renvoie à une dimension organisationnelle : quand on est CPE, si on exerce dans un seul établissement, on suit tous les conseils de classe. Mais, si on forme une équipe à 2 CPE, on peut avoir une division du travail : on peut se répartir les niveaux, se répartir les classes au sein d'un même niveau, ou alterner les suivis de classes à chaque trimestre. Mais, on doit faire intervenir, dans cette division, le suivi scolaire de l'élève : dans tous les cas de figure, on gagne et on perd ; le tout est de savoir ce que l'on gagne et ce que l'on perd. C'est un jeu d'options pour les CPE. Alors, on peut dire que le suivi scolaire nécessite la présence du même CPE pendant tous les conseils et durant toute une scolarité. On peut prendre une filière tous niveaux confondus (2e, 1ere, T de la même filière, et redoublement (s) éventuel (s)). Cette division concrétise ce qu'est un suivi. L'autre face du suivi, c'est aussi la fiche de suivi : (ex : à l'issu d'un événement dramatique…) on retranscrit les événements qui se sont passés au cours de la scolarité. Il s'agit d 'un suivi qui est la mémoire de l'élève dans l'établissement. Le CPE est le seul qui puisse se prévaloir d'un suivi global de l'élève (grâce à sa disponibilité et sa constance). Ce suivi s'installe donc dans la durée, sur la scolarité et sur l'histoire individuelle ; c'est un suivi dans la relation éducative. Þ ceci implique d'avoir une force de conviction, de crédibilité, qui permet de suggérer, d'exiger ou de sanctionner. LE TRAVAIL DU CPE S'EXERCE AVEC D'AUTRES PARTENAIRES 1) Pour se poser la question de la réussite scolaire il faut se poser la question du travail avec les enseignants. Ce travail est difficile. Pourquoi ? : · Dans le système traditionnel, l'enseignant avait la noble tâche et le CPE qui sanctionnait. Aujourd'hui, on ne peut pas laisser tout passer. La sanction est utile, mais comment la faire appliquer, et dans quelles conditions ? On sait qu'être enseignant aujourd'hui est difficile, ce qui entraîne beaucoup de souffrance, pas partout, et pas avec le même degré bien sûr. · De plus, en 97, F. Bayrou a octroyé aux enseignants des attributions proches de la mission du CPE Þ problème, car le PP a des attributions parallèles au CPE : Les enseignants, dans la classe ont un rôle de transmission du savoir, mais aussi de socialisation. L'enseignant est un adulte référant du groupe classe. L'enseignant a la possibilité d'intervenir dans l'apprentissage de la citoyenneté (formation des délégués) Þ il faut une collaboration avec le CPE pour qu'une reconnaissance ait lieu. Le CPE possède lui, les informations recueillies hors de la classe, dans la durée, et il est la mémoire des équipes pédagogiques. Þ Il faut donc une collaboration prof-CPE surtout quand un élève n'arrive pas à voir la cohésion du système : ça met du cadre pour l'élève. Þ L'axe PP- CPE est un axe d'ouverture vis-à-vis de l'ensemble de l'équipe pédagogique. 2) Travail avec l'AS et l'infirmière. Une des mission confiée à l'école est la mission de santé : on pourrait tout à fait considérer qu'elle relève du domaine de la famille. Mais, si on pose comme principe qu'il y a d'un côté la famille, de l'autre l'école, qu'entre les 2 il n'y a rien, et qu'au bout, il y a la vie active, il faut bien se partager entre les 2 institutions (famille-école). Du point de vue de l'école, ce point santé peut être travaillé par une étude scientifique par exemple Þ importance du rôle et du travail en commun CPE - infirmière - AS dans les CESC. Þ Il y a des thèmes qui sont communs aux familles et à l'école, où l'école s'investit sans en prendre toute la responsabilité. Þ Le CPE a pris en charge l'entrée du social dans l'école. Il est partie prenante et à une fonction de mise en rapport. Le CPE a toute sa place. CONCLUSION Aujourd'hui, le CPE, surtout en lycée est un personnel qui, selon les moments de son intervention est en état de faire face soit à l'adolescent, soit à l'élève, soit au jeune adulte ou au citoyen. 3E PARTIE : ETUDE DE CAS. ·A, 15 ans ½, rentre en classe de 2E. Inscription en cours de septembre suite à un déménagement. Habite avec sa mère et son frère. Interne, car sa mère et son frère sont hébergés. · 1er conseil de classe de 2e : comme tout au long de sa scolarité, on présente d'elle une double facette, sur un même bulletin, avec différents enseignants : brillante, bonne participation agressive, aucun travail. · Quelques jours avant le conseil, plaintes de profs au CPE Þ celui-ci rencontre l'élève Þ " il faut que tu changes "Þ changement effectif de comportement de l'élève mais qui ne dure que quelques jours. · Le CPE évoque la situation personnelle de l'élève au conseil de classe Þ l'équipe pédagogique oriente l'élève vers l'AS qui apprend que l'élève a été violée par le 2e mari de la mère, d'où le déménagement de la famille. · Le comportement ambivalent de A continue tout au long de l'année de 2e. Elle fait de plus en plus état de son problème personnel pour se justifier auprès de l'équipe pédagogique. · Rentrée en 1ere : crise Þ placée à sa demande en foyer ASE. Les absences perlées se transforment en absentéisme : elle s'oriente vers la voie non-scolaire Þ intervention du CPE qui contacte également son éducateur : plus ne va, elle a des potentialités mais un problème de comportement dont les profs se plaignent Þ réunion de l'équipe pédagogique : les enseignants hommes ne doivent plus faire d'entretiens seuls avec elle. Il faut exiger qu'elle change de comportement et qu'elle d'être manipulatrice. De plus s'ajoute un rapport particulier à l'argent : elle en vole à sa mère. · Terminale : elle a fait une TS : elle arrive dans le bureau de la vie scolaire et dit au CPE (pas celui qui la suit habituellement) qu'elle a fait une bêtise ; elle a avalé des médicaments, ne sait plus quoi, ni combien Þ hospitalisation Þ revient en cours. · Conseil de classe : toujours la même problématique de travail. Les enseignants ne veulent pas se laisser déborder par le social Þ avertissement travail et conduite + orientation vers l'AS. Puis, comme toujours tout continue, concertation de l'équipe Þ échange prophylactique. A se retrouve scolarisée dans un autre établissement. Là encore, son comportement est identique. En juin A obtient son bac. Ici, on voit que l'école a une mission. Ce n'est pas un lieu de soins. Il y a bien sûr des appendices pour se soigner. Mais, l'école est bien identifiée comme un lieu de travail, car derrière, il y a l'idée d'insertion professionnelle. Thèmes abordés par cette étude de cas : évaluation d'une situation travail en équipe, concertation circulation de l'information degré de tolérance liaison de l'établissement avec l'environnement liaison avec la famille difficultés sociales qui n'est pas cependant un passeport illimité pour justifier d'une attitude par rapport à l'institution dimension sociale : qu'est-ce que l'enseignement et enseigner. 4E PARTIE : DEBAT : quelques questions. © Ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie |
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