Dominique Schnapper, plus que sociologue
Le Monde, vendredi 23 mars 2001
A première vue et pour reprendre un terme populaire parmi les sociologues, Dominique schnapper, qui vient d'entrer au Conseil constitutionnel, est en matière de savoir une "héritière". La sociologie n'est elle pas inscrite au coeur de sa parentèle, et son arbre généalogique ne croise t 'il pas certains des fondateurs Français de la discipline comme Emile Durkheim ou Marcel Mauss? Malgré ce capital social [...] le choix fut difficile pour cette femme née en 1934 d'une mère, Suzanne Gauchon, condisciple et amie de la philosophe Simone Weil et d'un père Raymond Aron, camarade de Jean-paul Sartre à l'école normale supérieure, avec lequel il devait fonder les temps modernes avant que leurs routes ne se séparent.
Elle fait ses études secondaires au lycée molière à Paris, en même temps que Pierre Joxe, puis Science PO. Elle fut à l'origine de la création du centre d'études Juives à l'école des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS). Elle se définit comme une femme du centre, dans un milieu de sensibilité de gauche. Elle rencontrera Bourdieu, alors assistant de Aron au centre de Sociologie Européenne. Celui-ci l'orientera vers une sociologie tres éloignée de style de Raymond Aron. Leurs voix divergeront dès 1968.
Elle publie l'Italie en rouge et noir en 1971, l'épreuve du chômage en 1981. Sa participation à la commission de la nationalité réunie en 1987 sous la présidence de Marceau Long, et ses travaux sur les juifs, l'ont conduite à parler de 'sociologie historique'. Le résultat de son travail sur l'intégration, dans les années 1990, consistera en une série de livres, de la France de l'intégration en 1990, à La Relation à l'autre en 1998. Ces livres organisent une vaste réflexion sur la nation et sa puissance intégratrice.