CHARLOT
Pour le savoir, contre la stratégie

Jean Jaurès a permis l’alliance entre l’école laïque et les mouvements populaires. Depuis la massification on note deux conséquences : D’une part la sélection, d’autre part la scolarisation du professionnel.

Les familles sont de plus en plus dépendantes de l’école, mais simplement du fait de l’objectif insertion professionnelle. Le Droit à l’école est, de fait, devenu plus une obligation.

Or l’école oblige à sacrifices. Notamment pour les jeunes, elle oblige et peut paraître contraignante sans raisons. Quant au chômage il induit et des processus de démobilisation, et des processus de surmobilisation. Finalement être enfant c’est tout sauf une sinécure, sans compter les stratégies parfois démesurées des parents.

De plus on s’apercoit que de plus en plus pour réussir, il faut autre chose que l’école. Ainsi l’école est déligitimée puisqu’elle ne réussit plus seule à faire réussir. Mais de l’autre coté on assiste à une pédagogisation de l’espace social. Pour refonder l’école il faut (Charlot) ramener la question au savoir, et partir du fait qu’il existe sous des formes différentes et que des formes différentes de rapport au savoir existent. Pour beaucoup de jeunes apprendre c’est savoir se débrouiller dans n’importe quelle situation. A partir de là l’école est comme tout, rue, famille et tout y est permis, y compris la triche.

Cette question du rapport au savoir est importante à l’heure actuelle. Notre vie quotidienne implique de nouveaux savoirs, le professionnel implique de nouveaux codes, il s’est un peu déréalisé !. Un peu partout, des qualités relationnelles, autrefois secondaires, viennent maintenant au premier plan et sont posées en compétences.

Depuis les lois de décentralisation l’école est de plus en plus pensée en termes de proximité, de même les ZEP induisent des discriminations, certes positives, et sont des entorses à l’école républicaine.

Quant aux professeurs qui pensent en terme d’universalité, de l’élève, des savoirs…, on leur a demandé de gérer l’hétérogénéité des élèves. Ainsi apparaît la fracture : l’école républicaine qui s’est construire contre le local, contre le notable et le particularisme, est démantelée. Ainsi les professeurs se retournent-ils contre les parents dont ils invoquent la démission. Mais le fait d’être dépassé est de l’ordre de la souffrance, pas de la démission. Surtout que beaucoup de parents, notamment de milieux populaires, font confiance à l’école et mettent de l’espoir en elle. Et cela est très important, notamment pour les milieux de migrants. Pour les enfants de l’immigration, leur position de transfuge n’a rien de confortable. A la fois porteurs des espoirs de leurs parents mais aussi condamnés à être totalement différents d’eux pour réussir à l’école. Ces jeunes, selon l’expression de Jean-pierre Terrail doivent « s’enfermer pour s’en sortir ». Différences selon les origines : portuguais et asiatiques appartiennent à des réseaux qui les soutiennent et leur permettent de prendre du recul. Mais pour les portuguais il y’a une forte attente de professionnalisation de la part des parents.

L’école est sujette à ce propos à un retour de sens. L’intégration se faisant plus maintenant par l’insertion professionnelle que par l’éducation à la citoyenneté, au vivre ensemble. Et donc pas d’insertion professionnelle égal pas d’intégration et conduites alternatives d’appropriation de ressources. De surcroît la société actuelle ne donne plus sens à la vie, d’ou apparition de personnes qui dispensent du sens facilement, par le nationalisme, la haine ou l’intégrisme.

Cependant, au dela de l’identitaire, on assiste à des attentes réelles envers l’école : notamment en terme d’instruction, et non d’éducation, la famille y suffisant. Sans oublier cependant que le rapport au savoir, à l’instruction, est fortement structuré par la famille suivant les expériences douloureuses ou non des parents.

Pour conclure, les processus s’articulant les uns aux autres, on ne peut raisonner en termes de culpabilité. Il y’a des choses qui se passent au sein des familles qui n’empêcheront jamais certains enfants de réussir à l’école et, à l’inverse, Il y’a des choses qui se passent à l’école qui n’empêcheront jamais certains enfants de réussir, compte tenu de ce qui se passe dans leurs familles…

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