Catherine Kintzler
Revue les temps modernes de juin 1990

Aux fondements de la laicité scolaire
Essai de décomposition raisonnée du concept de laicité

 

La page laicité du site

Trois composantes se conjuguent pour former le concept de laicité : La société civile, la puissance publique, l'école républicaine (seule celle ci pose problème). Penser une école laique c'est penser un lieu soustrait autant que possible à la société civile.
Le société civile est laique, c'est à dire le lieu de la coexistence des libertés. C'est de la tolérance. Il est important que cette tolérance de croire, ne pas croire, adhérer ou non, soit protégée par un droit commun qui règle la coexistence des libertés. De surcroit il est nécessaire que les choses relevant de la croyance ou "l'incroyance" demeurent dans la sphère privée. Elles ne deviendront affaire publique que si elles sont à l'origine d'un crime ou délit relevant du droit commun.
La puissance publique est garante de la société civile. On ne peut donc lui accorder cette tolérance qui l'est à la société civile, car cela en ferait une affaire publique et ne garantirait plus le droit commun.
Ainsi, et cela ne peut s'intervertir, la puissance publique garantit la tolérance qui règne dans la société civile et protège la sphère publique de la sphère privée.
Dans le cadre de l'école, les deux premiers concepts sont ils suffisants pour penser la laicité de l'école ? Non, ils sont nécessaires mais pas suffisants. Pour définir le concept de laicité scolaire, il faut tenir compte de ce qui se fait à l'école : l'instruction ! et il faut répondre à cette question : pourquoi l'école doit elle être soustraite à la société civile ?

Raisons juridiques : - L'école est obligatoire! or les élèves qui fréquentent l'école n'ont pas choisi leurs camarades et c'est d'ailleurs à ce titre que l'école est un lieu d'intégration et d'égalité. tolérer ainsi une manifestation religieuse de la part des uns c'est l'imposer aux autres, qui ne peuvent s'y soustraire.En effet les élèves sont astreints à la coprésence. Faire cela c'est laisser la porte ouverte à la ségrégation, ce serait transformer l'école publique en une multitude d'écoles privées fondées sur le principe de la séparation entre les communautés.
- La seconde raison juridique est que la plupart des élèves sont mineurs et n'ont donc pas encore formé leur jugement. On devrait donc, selon certains, leur asséner le poids de la liberté avant de leur en avoir donné la maitrise. On fait défiler les groupes de pression devant les jeunes en leur disant : 'débrouillez vous'. C'est se tromper sur la liberté de l'enfant car la liberté dépend de la puissance de chacun à se préserver de l'oppression et de l'aveuglement.

Raisons du savoir et de l'autorité : On s'instruit à l'école pour acquérir le savoir et la puissance qui permettront de se passer du guide ou du maitre. Il n'y a de véritable force que celle là : celle qui permet de devenir indépendant. Ainsi l'école n'a pas pour tâche première d'ouvrir l'enfant à un monde qui ne l'entoure que trop : elle doit lui faire découvrir ce que ce monde lui cache. Il s'agit d'émanciper. De surcroit, l'école doit transmettre le savoir encyclopédique, celui qui s'impose à l'humanité par sa propre force. Voila pourquoi l'élève est inclus dans l'espace scolaire, dans un espace qui n'a d'autres fins que de le mettre en état de prendre possession de sa propre autorité.

Il se trouve que depuis longtemps on demande à ceux qui ont toutes les raisons de hair l'école de diriger et règler celle ci, on ne s'adresse jamais à ceux qui sont concernés, le citoyen entre autres. Et même certains ministres, chargés de protéger l'école contre tout ces rapaces, la leur offre !



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