C.P.E. QUI ETES VOUS ?
Enquête d’identité

 

" Ca veut dire quoi C.P.E ?, c’est quoi ce métier ? "

Fonction méconnue dans le système éducatif français, pourtant originale à ce système, la fonction de C.P.E; est d’une utilité d’autant plus évidente que se manifeste actuellement une crise profonde de la société avec sa double réfraction dans les familles et dans l’Ecole. Le C.P.E. est assez mal connu des parents d’élèves et à peu prés inconnu du public et des médias.

Ce livre est en fait la présentation d’une enquête réalisée dans l’académie de Grenoble auprès de 40 C.P.E; de collège, lycée et lycée professionnel, classés ou non en Z.E.P.. Les quarante C.P.E ont été interrogés pendant une heure dans leur propre bureau afin d’obtenir des réactions à chaud et non le fruit d’une interrogation réfléchie.

 

PREMIERE PARTIE
Une approche du métier de C.P.E.

LA FONCTION DE C.P.E SELON LES TEXTES

Présentation de la circulaire du 28 octobre 1982, définissant le rôle et les conditions d’exercice de la fonction des C.E. C.P.E.

 

La circulaire répartit les responsabilités des C.P.E. en trois domaines :

Le fonctionnement de l’établissement : contrôle des effectifs, de l’exactitude et de l’assiduité des élèves, organisation du service des personnels de surveillance, mouvements des élèves. Il participe pour ce qui le concerne, à l’application des mesures propres à assurer la sécurité notamment des élèves.

La collaboration avec le personnel enseignant : échanges d’information avec les professeurs sur le comportement et sur l’activité de l’élève : ses résultats, les conditions de son travail, recherche en commun de l’origine de ses difficultés et des interventions nécessaires pour lui permettre de les surmonter; suivi de la classe, notamment, par la participation au conseil des professeurs et au conseil de classe, collaboration dans la mise en œuvre de projets.

L’animation éducative : relation et contacts directs avec les élèves sur le plan collectif (classes ou groupes) et sur le plan individuel ( comportement, travail, problèmes personnels); foyer socio éducatif et organisation des temps de loisir; organisation de la concertation et de la participation (formation, élection des délégués ...)

Le C.E. et le C.P.E. doivent être associés à tout ce qui concerne la vie scolaire et son devenir.
Les C.E. C.P.E., toujours selon la circulaire, ne doivent pas être spécialisés et doivent travailler en étroite collaboration avec l’intendance, le service médical et le service social, le chef des travaux, le C.D.I. ...
Les C.E. C.P.E. doivent être associés aux réunions de concertation de la direction : information, études des problèmes de la vie scolaire, prise de décision pour tout ce qui concerne celle-ci.

Enfin, les C.E. C.P.E. sont " les responsables de l’animation de l’équipe qu’ils constituent avec les autre C.E. C.P.E., les personnels de surveillance, les maîtres de demi-pension et les maîtres au pair, équipe sur laquelle reposent en grande partie, l’organisation et l’animation de la vie scolaire ".

CONDITION D’EXERCICE : 35 H PAR SEMAINE

La circulaire de 1982 constitue le document de référence pour l’ensemble des C.E. C.P.E. Elle fait disparaître la " honteuse " référence aux surveillants généraux. Interprétée, revisitée, cette circulaire est encore loin d’avoir été totalement assimilée, comprise par tous.

Cette circulaire n’a reçu que peu de compléments : l’un à l’occasion de la loi d’orientation de 1989 plaçant clairement les C.P.E. dans le champ pédagogique, dans les équipes pédagogiques, l’autre dans le Nouveau Contrat pou l’Ecole, associant les C.P.E. à l’instance de médiation à créer dans les établissements scolaires et réaffirmant leur rôle.

Ces évolutions ne sont pas négligeables et ont été , semble-t-il, bien perçues par la catégorie, rapprochant nettement les C.P.E. des enseignants, par le partage du champ pédagogique, le suivi des élèves et le travail de conseil en matière d’orientation.

La difficulté principale a toujours résidé dans la variété des responsabilités confiées à ces personnels, en fonction de la diversité des établissements, de la diversité des champs de compétence et d’incompétence des personnels. La circulaire ne dissimulait pas cette difficulté en soulignant que les responsabilités assumées par les C.E. C.P.E. " peuvent varier dans leur forme selon la catégorie et les particularités de l’établissement ". La circulaire enfonce le clou de personnels généralistes, tout en préservant la spécificité de leur mission éducative :

Par leur responsabilité à l’égard des élèves, les relation qu’ils établissent avec les enfants et les adolescents, ainsi qu’avec les divers partenaires du système éducatif, le rôle qu’ils jouent dans le domaine de l’animation, le climat de communauté qu’ils contribuent à créer dans l’établissement et surtout par leur apport personnel, les C.E. C.P.E. participent d’une manière décisive à l’organisation, à l’animation et à la rénovation permanente de la vie scolaire ".

L’impulsion donnée par cette circulaire s’est heurtée aux réalités du terrain. Mais elle a forgé, au fil du temps, un corps d’éducateurs se revendiquant d’elle.

 

LE METIER VU PAR LES C.P.E.

Le premier constat que l’on peut établir, sur la base des quarante entretiens réalisés, est que le métier de C.P.E. est un métier de l’éducation, un métier éducatif.

" Un C.P.E., c’est quelqu’un qui est au service des élèves. ... Notre but, c’est de faire en sorte que les élèves soient prêts à recevoir tout l’enseignement qu’ils doivent recevoir ".
" J’essaie de pratiquer mon métier bureau ouvert ".
"  C’est avant tout un travail de proximité, où l’éducation , c’est l’Education avec un grand E , c’est à dire éduquer au savoir être ".
" Aider les élèves à passer un cap. Pour moi, un établissement est une micro-société, il y a des règles de vie qui se rapprochent des règles de vie en société ".
" Je crois que c’est un métier où il faut ne pas s’enfermer dans des habitudes et où il faut aimer profondément les enfants, et avoir du plaisir à être avec eux ".
" Il me semble quand même que la fonction de C.P.E. doit répondre à certains principes : un C.P.E. est là pour un certain nombre de choses fondamentales, pour des valeurs, pour inculquer aux élèves un certain nombre de valeurs, la valeur essentielle étant l’apprentissage de la démocratie, de la citoyenneté, du respect de l’autre et de la responsabilité ".

Toutes ces approches et vision du métier ne sont pas identiques mais présentent comme point essentiel de situer, prioritairement la fonction de C.P.E. par rapport aux élèves. L’intérêt majeur de ces approches est de définir d’emblée le C.P.E. comme un personnel d’éducation, un éducateur, en charge des élèves, individu ou groupe.

autres approches :

communication et régulation

* " J’ai l’impression qu’on est face aux adultes dans l’établissement, je me considère un peu comme une courroie de transmission, comme un élément fondamental de la communication dans l’établissement. On a plus souvent des problèmes à régler avec les agents, les profs, l’intendance, le secrétariat ... C’est souvent moins facile qu’avec les élèves ".

* " On ne s’ennuie jamais, on bouge tout le temps, je me compare toujours au mécanicien qui met de l’huile tous les jours dans les rouages pour que tout se passe bien  "

la polyvalence

* " Le métier se définit surtout par la diversité de ce qu’on fait. On intervient dans de nombreux domaines. On est énormément sollicités de toutes parts, et pour tout et n’importe quoi, on est un peu la solution miracle à tous les problèmes sans qu’il y ait une vraie reconnaissance de notre métier ".

l’urgence

On travaille constamment dans l’urgence

le " flic ", l’assistante sociale, le psy, l’épicière et le garagiste.

* " Moi être le chef des vigiles du lycée, on est en train de nous mettre de plus en plus chef des vigiles, chef des surveillants ".

* " On est les seuls à défendre, certainement, le côté relationnel et plutôt éducatif de notre fonction. Les enseignants, l’administration, en gros, nous voudraient encore un petit peu les espèces de gendarmes un peu autoritaires qui feraient marcher les élèves le plus droit possible, alors que la fonction, à mon avis, a pris un caractère beaucoup plus social, éducatif ".

* " les gens s’attendent à trouver tout auprès de nous  ".

la polyvalence et la diversité des tâches rendent parfois la fonction peu lisible et cela mène à tout ou presque. Mais le problème le plus important, pour bon nombre de collègues, demeure celui du positionnement identitaire. Le C.P.E. fait il partie de l’administration, de la vie scolaire, du corps enseignant ?

La fonction de C.P.E. est trop floue et dépend beaucoup du chef établissement.

* " J’essaie de pratiquer le métier de manière autonome, je refuse l’assimilation complète aux personnels d’enseignement, aux personnels de direction . C’est vrai que ça présente des inconvénients des deux côtés, mais je l’assume complètement ".

* " On vient très souvent nous solliciter . Dans l’esprit des gens, il n’y a pas forcément incohérence par rapport à notre profession. Ils nous envisagent comme réponse au problème qui se pose dans l’immédiateté ".

* " Qu’on ne soit pas connu à l’extérieur de l’Education Nationale, ça peut s’expliquer, mais, à l’intérieur même, on est pas connu non plus ".

 

LA DIVERSITE DES C.P.E.

L’unicité du statut n’empêche pas l’existence de réelles différences : les personnels d’éducation travaillant en collège exercent seuls, dans l’immense majorité des cas, alors que leurs collègues de lycées ou de cités scolaires travaillent en équipe de plusieurs C.P.E.

Ce sous chapitre concernant la diversité des C.P.E. pourrait paraître obsolète dans quelques années. En effet, depuis la création des I.U.F.M., les C.P.E. reçoivent tous une formation en deux ans pour les candidats I.U.F.M et en un an pour les candidats libres. Je n’ai donc pas résumé cette sous partie qui constate la grande diversité des C.P.E. : anciens M.A., anciens surgé, ancien C.E. devenus C.P.E. ...

Comment devient-on C.P.E ?

par hasard
par volonté de travailler avec des jeunes
la continuité logique surveillant / C.P.E.
par choix
La diversité des conditions d’exercice du métier

Voir le Colloque sur ce métier

 

LA DIVERSITE DES CONDITIONS D’EXERCICE DU METIER

En fonction de son lieu d’exercice, du type d’établissement, de sa taille, de la configuration des locaux, de leur état général, de la présence ou non d’un internat, d’une demi-pension, de l’importance du ramassage scolaire, de la présence ou non d’un chef d’établissement adjoint ....les conditions d’exercice du métier de C.P.E. vont changer dans des proportions très importantes, au point de donner le sentiment à certains personnels d’éducation de ne pas faire le même métier.

"  on ne le dira jamais assez, chaque établissement est différent, a son ambiance qui lui est particulière, a son propre système de relations, son propre système de travail ".

Choix des C.P.E. : différence collège / lycée / lycée professionnel

Les avis divergent quand au choix de l’établissement. Pourtant, la majorité des C.P.E. interrogés préféreraient ne pas ou ne plus travailler en collège.
La présence d’un internat est aussi facteur de choix : même si l’internat est un lieu de socialisation par excellence, il amène des contraintes.
A la question : qu’est-ce-qui, selon vous, conditionne le plus votre pratique professionnelle, le paramètre le plus cité est le chef d’établissement. Il est considéré comme celui qui conditionne le plus directement le travail des C.P.E. La notion de management; la relation de travail ou de confiance avec le chef établissement, l’autonomie, la liberté par rapport à la direction sont jugées déterminantes par la majeure partie des C.P.E. Viennent ensuite la taille des établissements (" il faut absolument diminuer la taille des établissements à un effectif maîtrisable), l’histoire de l’établissement (conflit avec l’équipe de direction), les locaux (salubrité ou insalubrité) et en dernier lieu, la population scolaire ( il faut s’adapter à chaque population). Les surveillants ne sont quasiment pas cités, tout comme la question des rythmes scolaires : il est pour le moins surprenant que la question des rythmes scolaires, qui ne peut que concerner les C.P.E. présents pendant la majeure partie des horaires d’ouverture d’un établissement scolaire soit absente de leurs préoccupations.

 

LA DIVERSITE DES CONCEPTIONS DU METIER DE C.P.E.

les contacts avec les élèves, l’éducatif, l’écoute des élèves, l’animation éducative, la communication, le volet social, la pédagogie.

Les pratiques :

Disponibilité, écoute, être au service des élèves, rigueur de l’organisation du service scolaire, discussion avec les élèves, circulation dans les couloirs, internats, contrôle des absences, gestion du travail des surveillants, discipline, accueil des élèves, monitorat, formation des délégués, orientation et suivi des élèves , la liste est longue des domaines d’intervention, des tâches et des pratiques liées à ces domaines d’action et de responsabilité.

Les plus : arriver à créer un autre contact avec les gamins que les profs mais aussi travailler avec des jeunes (surveillants) ou encore l'aide aux élèves ...

Les moins : le travail administratif, la paperasse et les permanences, le fait de devoir imposer les limites de la fonction C.P.E., la résurgence du surgé ou du C.P.E. flic, la dispersion des tâches, le bureau des pleurs et des lamentations

Les problèmes professionnels :

Problème de connaissance ou de reconnaissance du métier

* " A l’extérieur de l’établissement, quand on rencontre des gens, déjà ils ne savent pas ce qu’est un C.P.E. c’est ah c’est les surveillants généraux. Ce n’est pas très gratifiant  ".

* "  Même à l’intérieur des établissements scolaires, on ne sait pas trop qui est le C.P.E., ce qu’il fait, on sait qu’on lui envoie les élèves quand on ne sait plus quoi en faire, mais sorti de là ... ".

Les problèmes de mutation, les problèmes liés au logement de fonction sont aussi deux problèmes importants cité par les C.P.E. interrogés.

 

LE PROBLEME DE L’IDEAL DU METIER

les personnels de l’éducation n’ont pas su, ou pas pu, développer un véritable idéal du métier avec des pratiques valorisantes connues et reconnues. Les personnels d’éducation n’ont pas pu, ou pas su, trouver l’espace pour la revalorisation de la fonction éducative, par une pratique renouvelée, tranchant définitivement avec le surgé. Mais l’on peut aussi dépassionner le constat, en soulignant que la difficulté de la tâche échue aux personnels d’éducation, est liée à une certaine forme de lâcheté de l’institution scolaire qui a laissé ce corps affronter seul son passé.

 

VERS UNE TYPOLOGIE

Faute d’idéal du métier, en fonction de leurs personnalités propres, de leurs expériences, des possibilités qui leur étaient offertes ou non, les personnels d’éducation se sont adaptés au contexte de la demande.

Certains profils : le C.P.E. flic, le C.P.E. toujours derrière son bureau, le C.P.E furet, introuvable qui court sans cesse au risque de s’éparpiller et de ne rien faire correctement, le C.P.E. animateur socioculturel, le C.P.E. " coucou " : l’orienteur, l’assistant social, l’adjoint de l’adjoint, le gentil C.P.E.

 

A la question " comment voyez-vous l’avenir du métier pour les cinq à dix ans à venir? ", les optimistes répondent : on va vers une reconnaissance de la fonction, les pessimistes ont trois sujets d’inquiétude : le danger des dérives séculaires, du retour au surgé ou d’aller vers un monsieur sécurité. D’autres manifestent leur souci au delà de la fonction elle même, du devenir du système éducatif dans son ensemble, et notamment son inadéquation croissante avec la vie dans certains quartiers difficiles, qui remet en question même le système. Enfin, quelques C.P.E. quoiqu’attachés à leur métier, s’interrogent sur la pertinence du clivage enseignement / éducation et ses conséquences négatives.

* " Des fois je suis un peu provocateur, je dis qu’à la limite, ça ne devrait pas .Dans le sens où les problèmes qu’ils abordent devraient être abordés par tout le monde ".

* " Finalement, il faudrait peut-être aussi repenser la fonction enseignante, l’enseignant enseigne et le C.P.E. règle les conflits : c’est un peu réducteur ! ".

 

DEUXIEME PARTIE
Les questions de formation initiale et continue

Ce chapitre consacré à la formation est très succinctement résumé et pour cause. Il prend en compte le cas des quarante C.P.E. interrogés, C.P.E. qui sont pour la majeure partie des C.P.E. ancienne génération, qui étaient soit M.A., soit qui ont passé le concoures de C.E. puis celui de C.P.E. Il n’est donc pratiquement pas fait allusion à l’I.U.F.M
On peut noter, avec quelque inquiétude, que sur les quarante interviewés, alors que vingt six ont bénéficié d’une véritable formation initiale en centre de formation il n’en reste que seize à s’en déclarer satisfaits ou très satisfaits.

Formés, plus ou moins bien, ou non formés, l’ensemble de ces personnels sont ensuite entrés en fonction avec des fortunes diverses, ont appris sur le tas, ou ont essayés avec plus ou moins de bonheur, de mettre en pratique ce qu’ils avaient appris. Et la plupart ont constaté le décalage entre le discours théorique entendu dans les centres de formation et la réalité du terrain.

 

LA FORMATION CONTINUE DES C.P.E.

Dix des quarante interviewés n’ont pas demandé de stages de formation depuis au moins un an, et le plus souvent depuis deux à cinq ans. Plusieurs d’entre eux déclarent également avoir laissé passer, par inattention, la date limite d’inscription.
En outre, il existe beaucoup de critiques sur l’obtention des stages et les contenus de formation :

* " Il y a très peu de choses pour nous ".

* " J’ai demandé quelques stages qui étaient typiquement orientés sur ce qu’on nous demande : formation de délégués par exemple, mes demandes ont été refusées systématiquement ".

* " Il y a des stages qui m’auraient intéressé, qui ne sont pas forcément ouverts à mon corps ".

Un refus, dans le cas d’une demande multiple, est admis, une suppression de stage pour cause de restriction budgétaire est regrettée mais comprise, mais un refus faute de place, après plusieurs demandes, est très mal vécu.

LISTE DES BESOINS DE FORMATION RECENSES

-Le jeune, et son accompagnement
-Les nouvelles technologies
-Les conduites déviantes et la prévention des comportements à risques.
-Echanges professionnels, de pratiques professionnelles, de regroupements ou de rencontres
-La formation des délégués.
-La gestion des conflits
-Le domaine juridique
-L’orientation et le suivi scolaire
-La formation et la gestion des surveillants
-Les techniques d’animation
...

LES BASSINS DE FORMATION :

Les questions étaient les suivantes : " Avez-vous participé à la journée sur les comportements à risques sous l’égide de l’I.P.R. vie scolaire ? Savez-vous ou l’on en est dans votre bassin ? Que pensez vous de la logique des bassins de formation C.P.E. ? Est-ce une piste intéressante ? Est-ce que cela peut constituer, pour vous, un moyen de faire passer de la formation ?

Les réponses sont claires : dix des interviewés sont très demandeurs, vingt sept sont demandeurs.

Explications :

* " Ca fait du bien de parler de nos problèmes. Et nous, en collège on n’a personne. Les gens nous amènent leurs problèmes, et nous ... ? "

* " Les chefs d’établissements se réunissent quand même relativement régulièrement autour de leurs problèmes spécifiques, pourquoi ne pas envisager un petit peu la même chose au niveau des C.P.E., avec un côté formation, un côté rencontre, échange de difficultés ".

* " Notre gros problème à nous, comme on est constamment sollicités par des tas de petites choses, au moment de partir, souvent, on a un truc qui nous tombe dessus et on reste ".

 

LES PROBLEMES ET DIFFICULTES RENCONTRES PAR LES C.P.E. EN FORMATION CONTINUE

L’une des premières difficultés mentionnées est de pouvoir sortir de l’établissement. Les problèmes des déplacements, des trajets, et leurs corollaires, les frais de remboursement tardifs sont évoqués également à quatre reprises, avec les difficulté d’organisation, les gardes d’enfants pour les stages ayant lieu le mercredi.

L’absence d’incitation, a fortiori d’obligation, laisse le personnel d’éducation seul face à sa pratique. Pris par le temps, la quotidienneté et la diversité des tâches, il ne fait pas ou peu, l’analyse de ses difficultés.

* " Il y a un laps de temps trop important entre le moment où tu demandes le stage, le moment où tu peux l’avoir, où il t’est accordé et le moment où tu vas le faire ".

 

TROISIEME PARTIE
Manifeste pour un C.P.E. éducateur

 

Il est indispensable de répondre au problème de l’image professionnelle encore trop négative des personnels d’éducation, en leur permettant une réflexion collective de nature à les armer davantage encore pour faciliter une indispensable évolution.

L’éducateur, au sens large, et le C.P.E., plus particulièrement, doivent être l’incarnation de ce qu’ils contribuent à forger : des adultes solides, parvenus à maturité, des consciences libres, des esprits critiques et cultivés, des citoyens responsables.

La citoyenneté : l’éducation à la citoyenneté est incontestablement une préoccupation majeure de la société qui incombe logiquement à l’école. L’apprentissage de la citoyenneté passe par le simple respect de l’altérité, de l’intégrité de l’autre; la capacité à entendre un autre point de vue que le sien, apprendre l’échange, le dialogue, le débat.
L’initiation à la représentation via les délégués de classes et la représentation des lycéens ou des collégiens au C.A. doit être développée.
La citoyenneté est indissociable du sentiment d’appartenance à la collectivité de l’établissement scolaire. Ce sentiment d’appartenance doit être développé autant que faire se peut, par la liberté d’action des jeunes dans le cadre du lycée ou du collège, par leur association à des actions d’animation, par leur mise en responsabilité au sein de l’établissement.

La formation des représentants des jeunes est une nécessité pour les aider dans une tâche ingrate, qui s’apprend. Dans un contexte de dialogue social, la mise en situation de responsabilité des élus, et des jeunes, doit être une direction de travail, pour aller, le plus possible, et selon le contexte, vers des situations d’autonomie et de responsabilisation.

De même, un travail sur la loi avec une mise à jour du R.I. ou des textes régissant la vie scolaire en collaboration avec les représentants des élèves s’impose régulièrement.

La prévention : de la bonne connaissance d’une situation difficile, ou d’un problème, d’une information rapide ou tardive, d’une action concertée ou non dépend l’efficacité de la prévention. La collaboration avec le service social, l’assistante sociale, et avec le service de la promotion de la santé en faveur des élèves, l’infirmière et le médecin scolaire, est fondamentale en matière de prévention.

La sanction : Sujet de préoccupation professionnelle fréquent pour le C.P.E., non que cette responsabilité lui incombe directement mais parce qu’il est très souvent saisi par l’un des acteurs de l’établissement.

Le C.P.E. n’est ni chargé du maintien de l’ordre, ni de l’application du règlement intérieur, et ne peut donc pas être en charge de la sanction, comme décideur ou exécuteur des basses œuvres. Le C.P.E. ne saurait davantage se voir confier la responsabilité de la sécurité au sein de l’établissement scolaire ( et à fortiori aux abords), qui relève des prérogatives et des responsabilités du chef d’établissement.

L’éducation à la Loi, aider les jeunes à intégrer la règle, sont des domaines d’action importants du C.P.E, dans la voie de la socialisation des jeunes , pour l’intégration, contre l’exclusion.

Cela signifie plus particulièrement pour le C.P.E., de lutter contre les trois morales ou règles de conduite observées par une majorité des jeunes, qui conduisent la société à se déliter :

" pas vu, pas pris "
" si je suis pris, je ne l’ai pas fait exprès "
" Si ce n’est pas moi, je connais l’auteur du fait qui m’est reproché, je ne dis rien parce que ce n’est pas mon problème ou parce que j’ai trop d’honneur pour balancer ".

Comment éduquer dans de telles conditions ?

La médiation : c’est un rôle ingrat, délicat où l’on ramasse des coups et des bosses plus souvent qu’à son tour ... il s’agit pourtant d’un rôle capital, dans le maintient d’un climat propice à l’enseignement et à la confiance envers l’institution scolaire.

Le rôle du C.P.E. est de rendre possible ou de faciliter, d’encourager, de créer un climat de confiance et d’être le plus en retrait possible.

L’on aura également noté que citoyenneté, sentiment d’appartenance, intégration, confiance, autonomie, responsabilisation, prévention, médiation, et développement de la vie associative et culturelle, sont autant de moyens d ’éradiquer une violence beaucoup moins présente dans les établissements scolaires que ne le disent les médias, qui est un phénomène inhérent à toute société et que l’on doit combattre par l’éducation..

 

LE DOMAINE D’ACTION INDIVIDUELLE

Le suivi individuel est peu visible, mais important: respect mutuel, confiance, transparence, qualité de l’écoute, disponibilité, dialogue, confidentialité, empathie, humanité et sérénité doivent être présents dans cette relation. Cette qualité de relation exclut toute forme de familiarité.

Le suivi individuel du jeune passe par la connaissance des conditions et du déroulement de sa scolarité, ce qui signifie la présence du C.P.E. dans le domaine de la pédagogie, le travail en liaison avec l’équipe enseignante et des contacts privilégiés avec le professeur principal.

Au compte des jeunes, le C.P.E. doit lutter dans le discours et par les actes, contre le pessimisme ou la morosité qu’inoculent parfois les adultes aux jeunes, en résistant aux affirmations à l’emporte-pièce comme tout fout le camp, le niveau baisse, les jeunes d’aujourd’hui sont ignorants.

Dans le domaine de cette action individuelle le C.P.E. est confronté à une difficulté particulière : tout travail avec un jeune, d’écoute, de conseils, voire de remédiation, demande du temps. Cette dimension capitale du temps est souvent écrasée par les nécessité de la vie de la classe. Le C.P.E. doit parfois rappeler aux autres adultes de l’établissement cette dimension de travail en commun. L’aide aux élèves en difficulté scolaire, parfois de nature pédagogique, passe le plus souvent par le fait que le C.P.E. permette au jeune de reprendre confiance en lui et retrouve sa dignité.

En cette fin de vingtième siècle, il n’est que temps d’en finir avec une profession de C.P.E. sous influence, de la part des autres acteurs du système, notamment du chef d’établissement, pour en arriver à un métier d’éducateur émancipé de ses tares initiales et des influences négatives externes, permettant un rapprochement statutaire entre enseignants et éducateurs, une réunification de l’enseignement et de l’éducation, tant il est vrai que c’est l’union des deux qui contribue à la réalisation d’un produit fini : l’homme instruit et éduqué, le citoyen. Cela passera, vraisemblablement par la disparition du corps des C.P.E., la fonction étant éventuellement assurée par roulement par des enseignants.

 



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