Introduction : Eloge de la polémique
I : En un combat obscur : des attaques contre les sciences de léducation à la remise en question de la démocratisation du système éducatif.
* La pédagogie critiquée "sur sa gauche "
* Le choc des Instituts Universitaires de Formation des Maîtres
* La légitimité de la recherche éducative
- Eclairer les choix
- les incarner
- instrumenter les choix
- contribuer à lévaluation des effets
Problème : léducation peut être un enjeu de pouvoir .
Les débats actuels font bien souvent penser à lhistoire du Cercle de craie caucasien : Bertold BRECHT raconte dans cette pièce, lhistoire dun enfant abandonné par une princesse, élevé par une servante. Cette dernière réussit à sauver la vie de lenfant et à faire son éducation jusquau jour où la mère biologique réclame son fils. Un procès a lieu et le juge trace un cercle au sol à la craie et place lenfant au centre. Il demande ensuite à chacune des deux mères de prendre un bras et de tirer : celle qui lattirera de son côté hors du cercle aura lenfant . Evidemment la mère adoptive lâche lenfant à trois reprises de peur de le mutiler. Le juge lui attribue lenfant, voyant dans ce refus une preuve irréfutable de son affection pour lui.
Nos enfants et nos élèves ne sont ils pas, bien souvent, au centre du cercle, entourés dadultes qui veulent se les approprier pour servir leurs intérêts, satisfaire leur narcissisme ou valider leurs théories.
Naurons nous pas fait un immense pas en avant dans ce pays quand nous serons capables de poser ensemble les problèmes éducatifs que ce soit les problèmes de finalité, les problèmes de faisabilité daccompagnement ou les problèmes dévaluation avec sérieux et sérénité ? Car le danger du " consensus mou " nest pas là, il est plus tôt dans lesquive permanente des vrais problèmes, loscillation stratégique entre la dictature des experts et la démagogie des politiques, la désignation médiatique et rituelle des boucs émissaires qui opère magnifiquement des réconciliations de surface quand les vraies questions sont systématiquement escamotées.
ALLEGATION N°2 : Les Sciences de léducation ne sont pas une véritable discipline universitaire, elle sont en réalité un lieu de refuge des exclus, des autres disciplines où se tiennent des bavardages idéologiques sans fondement ni statut épistémologique.
* Les sciences de léducation : entre science
et idéologies
* Vers un statut épistémologique des Sciences de léducation
Les sciences de léducation affirment quelles cherchent toujours à articuler 3 pôles :
- un pôle axiologique qui renvoie à la définition
des fins et mobilise la réflexion philosophie et politique,
- un pôle scientifique qui renvoie aux connaissances élaborées par
les sciences humaines (psychologie, sociologie, liguistique, économie) mais
aussi par les sciences expérimentales (comme la biologie),
- un pôle praxéologique qui renvoie à linstrumentation possible
et au registre de laction régulée.
ALLEGATION N°3 : les militants pédagogiques sont de dangereux personnages, ils décrètent lautonomie des personnes tout en imposant leurs choix idéologiques par leur pouvoir charismatique.
Le pédagogue était lesclave qui dans lantiquité amenait lenfant à lécole. Cependant, DURKHEIM souligne son pouvoir éducatif puisque cest lui qui choisissait les répétiteurs et les disciplines. Il suivait lévolution de lenfant et changeait de mentor selon celle-ci ou selon son estimation sil jugeait que les méthodes pratiquées nétaient pas dignes de son pupille. Donc, ainsi définie, la pédagogie était une réflexion de type axiologique.
On peut donc définir aujourdhui la pédagogie comme la "réflexion sur léducation des personnes en tant que cette éducation seffectue à travers des apprentissages déterminés". En ce sens, la réflexion pédagogique ne totalise pas la réflexion éducative car il existe des éducateurs, des institutions, des situations éducatives où la médiation des apprentissages nest pas vraiment prise en compte ou nest pas prioritaire mais en ce sens, la réflexion pédagogique fait partie intégrante des préoccupations légitimes des sciences de léducation.
* Le paradoxe de linjonction de liberté
Comment prêcher lindépendance sans sériger du même coup en prophète et récupérer ainsi formidablement potentialisée, lautorité que lon prétend avoir abandonnée ?
La seule issue serait alors dans une sorte dabstention éducative totale, une disparition qui ne se soit pas une manière dexalter sa propre présence, une disparition discrète derrière les savoirs à enseigner. Cest la position d Hannah ARENDT : " le rôle de lécole est dapprendre aux enfants ce quest le monde et non pas de leur inculquer lart de vivre ".
ALLEGATION N°4 : la pédagogie sous estime la dimension culturelle et la fonction politique de lécole.
* Unifier ou individualiser ?
ROBESPIERRE est plus clair que Condorcet : " Ainsi depuis cinq ans jusquà douze ans tout ce qui doit composer la république sera jeté dans un moule républicain. Là traités tous également, nourris également, vétus également, enseignés également, légalité sera pour les jeunes élèves non une spécieuse théorie mais une pratique continuellement effective ". (ici projet des suppressions des différences, de lidéal Républicain auquel va sopposer une " revendication du droit à la différence" ) .
Il sagit de réaliser lunité nationale en sopposant à tous les particularismes, quils soient linguistiques, culturels, religieux, familiaux ou corporatistes. Dentrée de jeu, lécole de la république est porteuse dune double mission impossible : unifier et différencier, éradiquer les différences et permettre l'expression de chacun.
Catherine KINTZLER résume dans cette expression : " Pour sintégrer à lhumanité, il faut sarracher un moment à la société ".
* Unifier et individualiser (p62)
Que veut on dire en effet quand on affirme quil faut transmettre aux enfants les grands acquis de "la culture universelle" ? Veut on indiquer par là quil existe des auteurs et des connaissances qui ont été définis une bonne fois pour toutes comme ayant valeur universelle et que cest cela quil faut imposer aux élèves quoi quil en coûte ? Ou bien veut on dire que cest au pédagogue, par son action pédagogique, par son action didactique à tenter de faire partager la valeur de certaines oeuvres, lémotion, la joie, la lucidité quelles procurent et à établir par là leur valeur universelle ?
Ainsi peuvent sarticuler les deux vocations premières de lécole républicaine : dune part unifier et permettre laccès de tous à un horizon duniversalité, dautre part différencier en reconnaissant à chacun son identité. Cest pourquoi nous ne pouvons que souscrire à la formule dOlivier REBOUL et plaider comme lui pour : " une éducation de la rencontre, par et pour la rencontre ".
ALLEGATION N°5 : la pédagogie est source dillusion : en laissant supposer que tout échec est dépassable, elle nie le principe de réalité.
Anonyme : " le vrai révolutionnaire incorpore le passé, cest à dire lunivers parental et le dépasse. Le contestataire lui se coupe de toute racine et ne peut que créer des uvres inauthentiques. Le nouveau nest véritablement nouveau que lorsquil contient lancien et le dépasse " .
ALLEGATION N°6 : la pédagogie a contribué à la massification de lenseignement, celle ci a abouti au triomphe de la médiocrité dans le système éducatif.
* Faut il privatiser le système éducatif pour déjouer les effets pervers de la massification ?
Lanalyse de Philippe NEMO très largement diffusée par les médias, sarticule sur un paradoxe : la création de lécole de Jules FERRY sest effectuée pour libérer linstruction de linfluence obscurantiste de léglise et de permettre aux citoyens daccéder à une pensée critique ; aujourdhui, lécole est passée sous la tutelle complète de létat qui diffuse lui même une idéologie obscurantiste, impose à tous les jeunes français un corps de programmes monolithiques et valorise les techniques de manipulation au détriment des vrais savoirs. Il convient donc, pour être fidèle à lesprit des lumières, de libérer léducation de la tutelle de létat.
* Faut il constituer des filières afin de promouvoir la qualité et déviter la sélection par léchec ?
Pour Philippe RAYNAUD et Paul THIBAUD, la richesse du système scolaire français tient à ce quil était parvenu, au début du 20ème siècle à trouver un équilibre relatif entre ses deux vocations historiques, lenseignement de masse, assuré par lécole primaire et garantissant lunité nationale, et lenseignement secondaire prolongeant la tradition humaniste et permettant la formation de lélite. Or ce dualisme primaire/secondaire a été remis en question, expliquent ces deux auteurs essentiellement depuis la réforme Haby et la création du collège unique. Nous nous sommes donc engagés dans un processus dhomogénéisation du système : puisque tous les enfants accèdent en 6ème, le secondaire a du progressivement se primariser et a abandonné sa spécificité et ses exigences. Lalliance des pédagogues constituée selon RAYNAUD par les théoriciens de la psychologie de lenfant ; les spécialistes des sciences de léducation et la hiérarchie de lenseignement primaire a réussi à prendre le pouvoir, à imposer un enseignement primaire prolongé ou règne une pédagogie démagogue et infantilisante à la place de lenseignement secondaire authentique qui se fondait sur la logique immanente de la culture scolaire.
Le point sur lequel lanalyse de ces auteurs nous paraît la plus pertinente concerne les procédures dorientation dans cette " école égalitaire " : ils soulignent en effet que dans la mesure où lon ne sélectionne plus lentrée des filières comme on le faisait jadis, lenseignement et particulièrement le collège qui en est le pilier central, doivent sélectionner par léchec.
* La démocratisation est elle synonyme denseignement au rabais ?
Rappelant que les conditions dans lesquelles lécole de Jules FERRY a été construite, Antoine PROST rappelle que " pour les républicain positivistes comme Jules FERRY, lécole primaire gratuite, obligatoire et laïque était dabord lécole du peuple. Au singulier mais dans un double sens : pour eux en effet, il ny avait décole autre ni à côté, ni par la suite. Lenseignement primaire ne constitue donc pas un premier niveau denseignement par lequel tous les enfants passeraient. Cest un enseignement autonome qui débouche sur la vie active ".
Aujourdhui on constate que si nos élèves de 3ème savent lire, ils ne savent guère déchiffrer le monde qui les entoure. Sans doute, beaucoup apprendront ils à le faire dans leurs études ultérieures, mais est il admissible quà lissue de ce qui constitue le dernier maillon obligatoire de lécole, alors que certains nauront peut être jamais de contact avec elle, on se satisfasse dun tel résultat et que lon tolère des exclus ?
Nous croyons, pour notre part à limpérieuse nécessité d " un collège pour tous ". Nous croyons que si de toute évidence, la démocratisation de lenseignement nest pas allée de pair avec sa massification, cette démocratisation reste un horizon essentiel qui ne saccommode daucune formule dexclusion ou de relégation. Nous le croyons pour des raisons qui sont à la fois heuristiques, pédagogiques, sociales et éthiques.
ALLEGATION N°7 : La démocratisation du système éducatif a jusquà présent été un échec complet. Toutes les tentatives volontaristes dune organisation démocratisante du système scolaire ont échoué. Il ne semble pas y avoir dissue dans cette direction .
* De vrais efforts pour une véritable démocratisation
Déjà la réforme HABY avait proposé de mettre en place des heures de soutien pour compenser les déficits de certains élèves et permettre le fonctionnement des classes de références hétérogènes.
Ne faut il pas alors pour sortir de loscillation, se dégager de ce qui fonde aussi bien les deux systèmes : lidée que lenseignement est consubstantiel de la notion même de classe ? Nest il pas temps dinventer une formule qui soit pour le XXIème siècle aussi originale que la classe le fut au XVIIIème siècle quand elle fut crée ? Car il ne faudrait pas confondre les moyens et les fins ; les structures scolaires sont des moyens qui doivent être au service dune fin : la formation des jeunes. Quand on découvre que les structures existantes deviennent un obstacle à la poursuite de la fin que lon sest donnée, le bon sens commande den changer.
* Le groupe de besoin : un opérateur institutionnel décisif.
II) vers une question centrale : de lexaltation de lenfant roi à la gestion de lanticipation en éducation.
Comme le signale Elisabeth ALTSCHULL dans un texte qui dénonce le "pédagogisme à laméricaine", "nous vivions dans un système où ce nétait jamais lélève qui navait pas compris le professeur, mais où le professeur navait pas compris lenfant".
OBJECTION N°1 : lenfant nest pas un être achevé, on ne peut lui donner les mêmes droits que ceux donnés à un adulte entré dans la maturité.
On attribue lidée même des droits de lenfant à trois fondateurs :
ROUSSEAU (" Comment aimer un enfant ", " Le droit de l'enfant au respect"...), Janusz KORCZAK, Françoise DOLTO.
1924 : 1ère déclaration des droits
de lenfant,
20/11/1959 : Convention des droits de lenfant est approuvée
par les 78 membres de lONU,
20/11/1989 : Version définitive votée à lunanimité par
les 160 membres de lONU
article 13 : " lenfant
a droit à la liberté dexpression. Ce droit comprend la liberté de
rechercher, de recevoir et de répandre des informations décidées de toutes
espèces, sans considération de frontière sous une forme orale, écrite, imprimée
ou artistique ou par tous les moyens de choix de lenfant ; Lexercice
de ce droit ne peut faire lobjet que des seules restrictions qui sont
prévues par la loi et qui sont nécessaires :
a) au respect des droits et de la réputation dautrui
b) à la sauvegarde de lunité nationale, de lordre
public, de la santé ou de la moralité publique. "
Le texte de la convention a suscité chez certains intellectuels des protestations. Ainsi, Alain FINKIELKRAUT affirme que " cette convention est soit ridicule, soit scandaleuse et à son avis, les deux à la fois ". En effet, lexplique t il, outre le fait que cette convention ne changera rien aux situations concrètes des enfants dans le monde, elle ignore la spécificité de léducation ; elle ignore quil est un temps pour apprendre les choses avant de les mettre en pratique, un temps dans lequel lenfant doit être protégé de ses responsabilités sociale et politiques trop lourdes pour lui , un temps dans lequel il doit se construire avant daccéder à la véritable maturité, le moment où il pourra enfin agir en citoyen. En affirmant le droit de lenfant à lexpression, à la liberté dassociation, au libre choix de sa religion on confond les buts avec les moyens. On écrase lenfant sous des charges trop lourdes pour lui et on ne lui permet pas de se former vraiment pour pouvoir les porter plus tard. Car, expliquent les adversaires de la convention des droits de lenfant, " léducation nest pas la vie, elle est la préparation à la vie. Lenfance nest pas lâge mûr mais la préparation à la maturité, à ce passage dans lordre des responsabilités qui donne sens à la notion même déducation."
On a ainsi confondu trop souvent le désir de savoir qui lui sans doute, peut être considéré comme constitutif de lHomme cherchant à percer le mystère de ses origines avec le désir dapprendre, qui suppose que lon suspende un temps limpatience du désir de savoir pour prendre précisément le temps dapprendre Et léducation scolaire jusquà lentrée dans la maturité serait précisément ce " temps pour apprendre ".
* Des droits formels aux droits réels.
Que ce soit Hannah ARENDT ou Alain FINKIELKRAUT, on est frappé par la difficulté quils ont à définir précisément les conditions du passage dans la maturité.
Se précise le rôle de la pédagogie : cest à elle de transformer des droits formels en droits réels, de permettre le passage dactivités spontanées très largement déterminées par les affects et les influences sociales à des activités réfléchies où peut jouer progressivement linsistance critique dune raison en construction.
Ainsi, faut il permettre à lélève de " se mettre en jeu " et danalyser avec les outils intellectuels quil a pu sapproprier, son rapport au pouvoir, son rapport aux autres. Et lon se trouve ici en réalité aussi loin dune dynamique de groupe qui entretiendrait un narcissisme collectif et ferait des processus groupaux les seuls objets dignes de connaissances, que du cours de citoyenneté où lon enseignerait magistralement le respect dautrui et les règles de fonctionnement dune collectivité démocratique.
OBJECTION N°2 : lenfant na pas que des droits, il a aussi des devoirs, une pédagogie qui le considère comme ayant toujours des excuses ne contribue pas à son éducation.
A en croire Elisabeth BADINTER les éducateurs daujourdhui se caractériseraient par leur " haine de la loi ". Ayant mal assimilé MARX, FOUCAULT et LEVI-STRAUSS nayant guère compris FREUD, ils voient dans la loi une forme doppression des individus, un dispositif de normalisation empêchant la libre expression et lépanouissement de chacun ; Cest pourquoi ils ne supportent pas lidée de punir et renoncent progressivement à toute sanction. Dans ces conditions, explique Elisabeth BADINTER, les enfants nont donc plus de devoirs, ils nont que des droits, ils ne commettent plus de fautes, tout juste quelques erreurs dues à un conditionnement éducatif défaillant. Au total, cela ressemble bien à une démission de ladulte qui sarticule à deux phénomènes : dune part la vision de lenfance et deux même quont les éducateurs car " faute dune distance suffisante entre lenfance et lâge adulte, punir nos enfants cest se punir soi même ainsi notre répugnance à faire mal est peut être plus égoïste qualtruiste ". Et, dautre part, si nous ne voulons pas punir cest que nous ignorons le véritable statut de la loi qui " met en lumière ce que nous avons de commun, cest à dire nos ressemblances au détriment de nos différences ", nous garantit contre le droit du plus fort et reste la condition sine qua non de la survie de toute société humaine.
Dans ces conditions, léducation libérale en laissant jouer les pulsions et les intérêts individuels ferait le lit de la violence, entraînerait la dissolution des liens sociaux et mettrait en danger lintégrité de létat. Très concrètement, elle rendrait impossible lacte même denseigner, les professeurs ne disposant plus des moyens pour faire respecter les règles nécessaires à la transmission des savoirs. Lécole, jadis à labri de la violence sociale y serait livrée aujourdhui compromettant ainsi sa mission propre. Plus grave encore, cette éducation " sans loi " interdirait toute véritable formation des personnes qui requiert, elle, une prise de conscience des contraintes imposées par la vie collective ainsi que la renonciation à toute puissance individuelle.
* Léducation nest pas limposition de la loi mais linstitution de la loi.
La loi, à lécole cest linstance structurante de la personnalité, ce qui se construit quand le sujet éprouve et régule ses affects, quand il découvre quil peut vivre ailleurs et autrement que dans la fusion affective, quand il cesse de jouer à " je taime moi non plus " pour poser en extériorité par rapport à lui et par rapport à lautre, des règles qui leur permettront à tous deux dexister. Conçue ainsi, la loi par définition , ne peut être imposée : on peut imposer des règles, imposer leur application par la sévérité des sanctions encourues, imposer le silence et même parfois la mort, mais on ne peut imposer la loi. La loi, on ne peut que la construire, péniblement en assumant tous les renoncements narcissiques quelle impose, dans un travail dinteraction régulée avec le groupe auquel on appartient et en fonction des objectifs que lon se donne.
Linstitution de la loi requiert un retour réflexif, un questionnement sur ses actes, une capacité danticiper les conséquences de ses choix, de se souvenir de situations analogues, dimaginer des situations nouvelles, de formaliser des institutions, dorganiser des démonstrations toutes ces choses qui sont bien des " objets de formation scolaires " dans toutes les disciplines.
OBJECTION N°3 : En prenant les élèves pour ce que lon voudrait quils soient, on les empêche de le devenir.
* De la nécessité de lanticipation à ses dangers.
Nous nous trouvons donc apparemment dans une impasse : lanticipation paraît tout à la fois éminemment nécessaire et profondément néfaste , elle serait un moyen essentiel pour la constitution de la liberté et de la raison des sujets, et en même temps, un danger grave pour leur évolution, une façon même de leur interdire toute évolution.
* Pour sortir de limpasse, un détour nécessaire : apprentissage et développement.
En dautres termes, un sujet se développe quand on lui fournit opportunément les moyens de dépasser le stade de développement quil a atteint, quand on lui propose un dispositif daide pour accéder à une fonction supérieure et quand on organise la disparition progressive de ce dispositif pour quil puisse penser et agir seul.
OBJECTION N°4 : On ne produit pas mécaniquement la liberté et la pédagogie en réalité est impuissante faire accéder lélève à celle ci .
Le problème pourtant nest pas nouveau. PLATON déjà dans " le Ménon " avait pointé cette extrême difficulté de la pensée relationnelle à penser lapprendre, à comprendre ce passage a proprement parler impensable, de lignorance au savoir, du non être à lêtre. Et ARISTOTE, dans " Léthique à Nicomaque " réfléchissant sur lapprentissage de la vertu, sétait demandé comment on peut devenir cithariste si on ne lest pas déjà : car comment apprendre à jouer de la cithare si ce nest en jouant de la cithare ? Et si lon joue de la cithare, cest que lon sait déjà jouer de la cithare. Or, explique Vlademir JANKELE VITCH, commentant ce texte " le problème se résout tout simplement par le fait : on devient cithariste en jouant de la cithare, comme cest en forgeant que lon devient forgeron. Dans la décision aventureuse de se jeter à leau, lapprenti rompt le cercle et miraculeusement irrationnellement commence à nager ".
* Anticipation instrumentale et anticipation éthique
Il nous faut prendre Daniel HAMELINE, dont lapport est décidément essentiel dans la pensée pédagogique de cette fin de siècle, faisant après coup, le bilan dune expérience de non directivité. Il suggère que la non directivité a échoué en tant que système mais reste essentielle en tant quattitude et il définit ainsi les trois caractères de cette attitude. " Elle consiste à antécéder sans anticiper , cest être là pour accueillir ce qui va se présenter sans le prévenir au point quil ny ait plus rien à faire. Valoriser sans juger, cest suspendre le fonctionnement spontané des stéréotypes et des catégories pour permettre à linterlocuteur dêtre entendu pour ce quil dit et non dabord pour ce quil représente. Réguler sans régulariser, cest éviter dengluer linterlocution dans les pièges de la dépendance affective sans pour autant interdire aux affects de sexprimer".
Si lon voulait, sans prétendre dépasser la formulation de Daniel HAMELINE, exprimer dune autre manière ce qui caractérise une attitude pédagogique capable de communiquer à lélève le courage dêtre libre, dapprendre et selon la formule de KANT définissant ainsi les lumières, " doser faire preuve de sa raison " nous pourrions dire quelle comporte un volet négatif et un volet positif : négativement dabord, pour que lélève sengage, prenne des risques, il ne faut pas verrouiller la situation didactique, positivement ensuite il faut que notre présence y soit une sorte dappel, que quelque chose passe dans notre regard par quoi nous reconnaissons la liberté de lautre.
OBJECTION N°5 : La pédagogie, par sa volonté de toujours mieux connaître les élèves sinterdit en fait de faire appel à leur liberté.
Cest un thème fondamental de léducation nouvelle qui na cessé dexploiter la fameuse formule épinglée par Hannah ARENDT " pour enseigner la lecture ou les maths à John, il faut connaître John tout autant que la lecture ou les maths ".
* Le risque de la compréhension bienveillante
* La chance de lignorance
Nous ne croyons pas que lécole puisse panser toutes les blessures de la société. Mais nous sommes sûrs, pour lavoir éprouvé nous même que dans les conditions les plus difficiles on peut quand même trouver un peu de joie à enseigner, pour autant que lon prenne les élèves tels quils sont sans renoncer à les faire progresser, dés lors que lon tente dallier lefficacité de linstrumentation didactique et le choix éthique de léducation.
3ème partie : Pour avancer dans laction : de linterrogation sur " laide méthodologique " à lélucidation des conditions defficacité des apprentissages scolaires.
Dés lors que simultanément un nouveau public et de nouvelles exigences apparaissent dans lécole, se pose inévitablement le problème de la méthode.
Ainsi, le souci de la formation méthodologique apparaît bien dabord comme lexpression dune volonté de lutter contre léchec scolaire.
La réflexion pédagogique commence à prendre en compte de manière systématique, les publics qui étaient jusque là exclus assez tôt de linstitution scolaire : or ces publics posent, de manière brutale la question des finalités de léducation : pourquoi les garder à lécole puisque les apprentissages traditionnels ont échoué avec eux ? Que doit on se donner pour objectifs quand les disciplines scolaires savèrent décidément hors de leur portée ? Les questions de méthode viennent ici opportunément se substituer aux questions didactiques habituelles. Par ailleurs, il faut observer que le travail entrepris dans les années 80 dans lenseignement technique et professionnel pour élaborer des référentiels denseignement va très largement contribuer à populariser la notion de capacité. Enfin, la rénovation des collèges lancée en 1982 par Alain SAVARY et qui se poursuit jusquen 1986, va pour sa part très largement utiliser cette notion, les formateurs et chefs détablissement y voyant un moyen de mobiliser efficacement les enseignants tout en sécurisant les parents auxquels on peut présenter les nouveaux objectifs de linstitutions scolaire comme conformes aux attentes dune société en mutation.
On voit se développer dans les établissements scolaires de nombreuses actions daide méthodologique en direction des élèves en difficulté : exemple : études dirigées : " apprendre à travailler ".
QUESTION N°1 : Peut on former lintelligence dun sujet avec des outils méthodologiques généraux et sans contenu de savoir précis, comme le prétendent les " méthodologues " ?
Ainsi dire que " lélève doit être placé au centre du système éducatif " a sans doute été nécessaire pour lutter contre un certain formalisme qui faisait de larchitecture des programmes le seul principe organisateur de tout scolarité, mais une telle formule peut laisser penser que lon subordonne tout apprentissage à la demande explicite de lélève et au niveau du développement quil a atteint par ses propres moyens
De plus, il régnait, dans lopinion intellectuelle, une sorte de fatalisme lié, en partie tout au moins à une certaine interprétation de l'uvre de FREUD et qui fut bien résumé, quelques décenies plus tard par le titre d'un best seller : " Tout se joue avant 6 ans". En fait, jusquau développement du courant de pensée qui se réclame explicitement de " léducabilité cognitive ", on ne pensait pas pouvoir intervenir de manière décisive sur le développement de lintelligence de ladolescent et a fortiori de ladulte.
* Le développement des méthodes déducabilité cognitive
(années 70 env.)
* Des éléments incontestablement positifs sur le plan des finalités et
des incertitudes sur le plan des résultats.
Le développement des méthodes déducabilité cognitive sest effectué, essentiellement sur des publics très faiblement scolarisés et à redonner une identité professionnelle à des formateurs généralistes ou psychologues.
Les méthodes déducabilité cognitive suggèrent une conception des rapports de lhomme et de la culture qui est sans doute, essentielle : pour elles, la culture nest pas une fin en soi, elle est un moyen offert à lindividu pour affronter des situations nouvelles, senrichir à sa propre initiative et se dépasser en mettant en uvre des " capacités " qui nont pas pour seul et unique but de permettre de réussir lexamen final de la formation.
A quelles condition un apprentissage " méthodologique " peut il être utilisé dans des situations précises ? Comment former à cette utilisation ?
QUESTION N°2 : la formation impose t - elle impérativement de travailler sur des contenus disciplinaires précis comme le prétendent les " didactitiens " ?
Gérard VERGNAUD , didactitien des maths donne cette définition : " la didactique est létude des processus dapprentissage par rapport à un enseignement spécifique à des contenus de savoirs donnés "
* Le développement des didactiques et le primat des apprentissages localisés.
Pour VIGOTSKY, qui peut être considéré comme un des véritables fondateurs dune théorie des didactiques, " la tâche de lenseignant nest pas de développer la réflexion, la mémoire, le jugement ou lattention, mais de nombreux comportements intellectuels particuliers portant sur des matières diverses . Il ne sagit pas de renforcer notre capacité générale dattention mais de développer différents comportements permettant de concentrer lattention sur des matières diverses".
* Des acquis certains mais une difficulté centrale qui subsiste
A quelles conditions un savoir acquis localement peut il être ré- utilisé de façon pertinente dans un autre cadre, avec dautres matériaux, dautres contenus ?
QUESTION N°3 : Comment la pratique pédagogique peut elle dépasser le débat entre " méthodologues " et " didactitiens " ?
* Une redéfinition de la notion " dobjectif pédagogique"
Un objectif didactique ne devient un objectif pédagogique cest à dire un objectif qui contribue à construire lautonomie du sujet apprenant que dans la mesure où cet objet est appréhendé en référence aux problèmes scolaires et extra-scolaires, quil permet de résoudre quand un sujet dispose à la fois dun outil et des conditions de son bon usage, quand il sait précisément ce quil peut en faire et est capable de lutiliser dans des situations absolument nouvelles pour lui. Nous disons quun objectif est à la fois pédagogique et opérationnel quand il est formulé en termes de corrélation dun outil et dune série de situations auxquelles cet outil est adapté.
* Une remise en perspective de la notion de " démarche pédagogique "
Triple mission de lenseignement : Contextualisation, décontextualisation, recontextualisation . Ainsi, explique PIAGET : " Réussir cest comprendre en action une situation donnée, à un degré suffisant pour atteindre les buts proposés et comprendre cest réussir à dominer en pensée les mêmes situations jusquà pouvoir résoudre les problèmes quelles posent quant au pourquoi et au comment des liaisons constatées et par ailleurs utilisées dans laction ".
* Pour dépasser la contradiction du général et du local
Chaque fois, lessentiel est pour nous que lélève construise une compétence, cest à dire dispose de la possibilité dassocier une famille de problèmes correctement identifiée avec un outil de traitement correctement maîtrisé.
QUESTION N°4 : Existe t il des connaissances à faire acquérir aux élèves en dehors des savoirs eux mêmes ?
* Prendre en compte les stratégies dapprentissage des personnes.
Pour prendre en compte les stratégies individuelles dapprentissage, les psychologues proposent dutiliser la métacognition (due à FLAVELL, Américain)
-3 paramètres :MEIRIEU propose deux couples de variables, le couple processus/produit et le couple sujet/objet et à trois dimensions de la métacognition : ladaptation, la régulation et lenrichissement des comportements dapprentissage.
QUESTION N°5 : Divers enseignements peuvent ils avoir des finalités communes ?
* Vers une inter-disciplinarité des valeurs.
Pour notre part, nous croyons que les valeurs qui doivent être promues par une véritable " Ecole Démocratique " sont de trois ordres : il sagit dabord des valeurs qui donnent véritablement corps aux compétences disciplinaires elles mêmes ainsi quà la réflexion métacognitive. Nous sommes ici dans le registre des valeurs intellectuelles dont nous sommes convaincus quelles sont véritablement fondatrices dune société démocratique où les rapports entre les hommes sont régis par la probité plutôt que dans des rapports de force. Mais il existe également des attitudes inter disciplinaires à dominante sociale qui permettent le développement harmonieux de la société civile elle même : cest tout dabord la capacité de surseoir à ses impulsions pour accepter le principe dune discussion argumentée. Cest aussi la détermination à ne pas chercher à obtenir laccord de lautre par la pression ou le chantage, à entendre sa différence, sans pour autant lapprouver.
Toutes ces attitudes qui peuvent même si elles sont malmenées par lhistoire, nous laisser entrevoir ce qui pourrait être une société à visage humain.
La troisième est à dominante politique : Robert BALLION souligne que lécole se rapproche dune sorte de marché éducatif où les jeunes passent quelques heures par jour parce quils ne peuvent pas faire autrement, développent des stratégies de réussite individuelle sans investir daucune manière ce lieu ni espérer même être partie prenante un jour ou lautre dans son organisation.
François DUBET note dans son étude sur les lycéens à quel point lintégration de ceux ci dans leurs établissement est liée à lexistence despace et de lieux où une négociation est possible ou des échanges concernant les études elles mêmes peuvent avoir lieu. On peut donc constater que ces valeurs sont dans létablissement, laffaire de tous.
QUESTION N°6 : Ne devrait on pas réduire très sensiblement les prérogatives de lécole et renvoyer de nombreux apprentissages au tissu économique et social ?
A notre sens, lécole reste une institution essentielle en tant que précisément, elle échappe aux pressions de lenvironnement et garantit un accès aux savoirs essentiels à tous les enfants.
1ère question : Que veut on vraiment ?
Que les enseignants enseignent ou que les élèves apprennent ?
2ème question : Comment apprend on ?
3ème question : Que peut proposer lécole pour mettre
en place chez les élèves une telle démarche ?
4ème question : Que cela signifie t il concrètement pour
lécole ?
Le métier denseignant ne sera plus un distributeur de savoirs mais le responsable dune démarche dapprentissage. Il sollicitera des partenaires.
5ème question : Cette redéfinition des responsabilités de lécole entraîne t - elle une diminution de son importance dans nos sociétés ? Non, lécole devient responsable de processus et non de procédures.
CONCLUSION : Vers une nouvelle utopie scolaire
La crainte majeur qui est la notre aujourdhui est celle dun désinvestissement par les enseignants de leur métier, dune sorte de présence absence dans lécole.
* Le tâtonnement des politiques
Pour enseigner aujourdhui à des publics de plus en plus hétérogènes, de moins en moins préparés, de moins en moins motivés, il faut une préparation nouvelle intégrant les contenus disciplinaires et les conditions de leur transmission ? : - création des IUFM
* Les enseignants, ni victimes, ni coupables
* Des enseignants responsables avec une mission spécifique.
Il nous faut redire ici notre conviction fondatrice : les enseignants ont une place essentielle dans la réussite ou léchec de lécole, ce qui ne signifie pas que leurs partenaires nont aucune responsabilité.
La famille joue un rôle essentiel dans léveil de lintelligence de lenfant par lensemble des stimulations quelle lui propose dans sa vie quotidienne, de plus elle inscrit lenfant dans une histoire et lui fournit une sécurité affective dont celui ci devra certes se dégager mais dont il a besoin pour se déployer. Les structures associatives ont un rôle décisif pour former lenfant à sengager dans des choix personnels, à en assumer les contraintes et à prendre les moyens de réussir les projets quil décide dengager : les associations sportives culturelles ou humanitaires, les bibliothèques, les centres sociaux, les animations de toutes sortes doivent donc être développées et il est de la responsabilités des collectivités territoriales de veiller à leur développement et à leur ouverture au plus grand nombre.
Nous dirions volontiers que lenfant a dabord besoin dune filiation, dune histoire, dune communauté affective où il soit reconnu et dans laquelle il puisse sinscrire, la détresse de ceux et celles qui ne disposent pas de cette réalité, leur désespoir même ou leur fuite dans une violence aveugle en dit long sur cette impérieuse nécessité.
Mais lenfant ne peut être seulement lhéritier cette tâche serait dailleurs trop lourde pour lui, le devoir dallégance susciterait à chaque instant la peur de trahir et lobéissance ferait vite rivalité mimétique : quand on approche de trop près le modèle comme lexplique bien René GIRARD, le conflit devient inévitable puisque le fils peut alors prendre la place du père. Il faut donc que lenfant prenne à la fois du recul et du pouvoir vis à vis de sa famille et de ce qui sy joue, et cest là, nous semble t-il un des rôles essentiels de lécole. Lenjeu fondamental même de tout apprentissage : apprendre cest comprendre doù lon vient et pouvoir décider soi même où lon va, apprendre cest percer le mystère de ses origines et devenir autre, parfois plus puissant ou plus lucide, toujours différent par rapport à ses parents, le savoir permet déchapper aux contraintes de la filiation ou ce qui revient au même, de les assumer librement.
A total, ce qui nous paraît important de sauvegarder aujourdhui cest cette séparation des pouvoirs éducatifs qui est à notre sens aussi contributive dune éducation à la liberté que la séparation des pouvoirs législatifs, exécutifs et judiciaires est fondatrice dune société démocratique.
* Pour un véritable partenariat : pour lutter contre toutes les formes d'exclusion
* Un débat majeur : doit on accepter de traiter léchec par lexclusion ?
En effet, lenjeu idéologique majeur de cette fin de 20ème siècle, ce sur quoi viennent échopper tous les systèmes de pensée et toutes les inventions institutionnelles, cest bien le fait de savoir si lon doit traiter léchec, toutes les formes déchec scolaire, social, affectif, culturel, économique .. par lexclusion ou si lon peut chercher dautres modalités de traitement plus conformes avec le projet dune société solidaire.
En face des partisans du traitement de léchec par lexclusion, il y a ceux qui en toutes circonstances cherchent dabord à " intégrer ".
* Utopies de la classification ou utopie de la mobilité ?
La chose nest pas si simple car les utopies les plus célèbres, que lon songe à Thomas MORE ou à HUXLEY sont fondées précisément sur des classifications minutieuses entre les individus et les groupes.
Or, précisément, il nous semble que ces utopies sont aujourdhui condamnées. Tous les systèmes fondés sur lorganisation rationnelle de groupes sociaux hiérarchisés, nous ont livré leur terrible secret : ce sont des utopies de mort dont les rouages se figent vite et qui pour mieux se reproduire à lidentique deviennent toujours des sociétés totalitaires.
Nous avons besoin aujourdhui dautres utopies, utopies de mobilité, de la différence, de lintégration. Nous avons besoin dutopies où les hommes puissent chaque jour reconstruire leur destin, où leur soient données à chaque instant des occasions dapprendre, de senrichir et de se développer, où leur ils puissent sans violence subvenir les catégories où lon pourrait les enfermer.
En bref, nous plaidons pour une authentique utopie éducative, une utopie de la rencontre et de la socialité plurielle, une utopie fondée sur la seule valeur qui puisse encore être reconnue comme universelle : celle dune relation sans violence.
* Vers une nouvelle utopie scolaire
On comprendra ainsi pourquoi nous estimons que lécole ne peut décider dexclure un certain nombre délèves de laccès à cette culture. On comprendra aussi pourquoi nous nous battons contre toutes les formes dexclusion scolaires : exclusion institutionnelle quand on enferme des jeunes dans des filières de relégation, exclusion pédagogique quand on enseigne des savoirs à des élèves sans leur donner du sens et leur permettre de les intégrer dans leur histoire, exclusion sociale quand on ne fait la classe quau petit nombre de ceux avec qui lon entretient des rapports de complicité.
Pour nous, le véritable progrès cest quand la culture nest pas imposée à des hommes par leurs semblables au nom dune norme civilisatrice mais quand elle les relie, leur permet de se reconnaître humains ensemble et déchanger quand elle les rend plus intelligents à eux mêmes et aux autres et au monde.
Et nous sommes convaincus que ce progrès là les enseignants peuvent en être les artisans, sans revendiquer de reconnaissance exceptionnelle, mais sans honte non plus.